Traditions :Les répétitions de batteries,Les Soumonces en batterie, Les Soumonces en musique, Les Bals, La Nuit des Trouilles de Nouilles, Dimanche-Gras , Lundi-Gras , Mardi-Gras

Publié le par gille

Les répétitions de batteries



Elles constituent la première étape dans la marche vers le Carnaval. Tout comme pour les deux autres soumonces, elle aura lieu deux dimanches de suite, l'ensemble des 13 sociétés se partageant ceux-ci.

On a décidé de séparer les différentes sociétés en deux groupes distincts lors des soumonces. En effet, vu le nombre élevé de membres dans chacune des sociétés, les soumonces étaient devenues trop importantes. Il ne faut pas oublier qu'il s'agit de répétitions en vue du Carnaval. De plus et n'ayons pas peur de le dire, les Binchois aiment s'amuser et marteler les pavés de leur Cité. Si ces deux groupes n'avaient pas été formés, les soumonces ne dureraient que trois semaines. Ce qui est fort peu, il faut en convenir!

La répétition de batteries est fort explicite de par son nom. Les 6 tambours et la grosse caisse constituant la batterie retrouvent vers 17 heures les membres de leur société dans leur local. Ils y jouent des "avant-dinner" à plusieurs reprises. L'ambiance monte, les vitres tremblent, les coeurs haussent leur rythme. Tous dansent dans le café.

Vers 20 heures, la société sort et va de par la ville, de café en café, suivant la cadence imposée par les tambours. C'est l'éclatement d'une attente longue de près d'un an qui s'extériorise par le pas du Gille. Auparavant, cette sortie n'avait pas lieu. Chaque société restait dans le café. Mais le nombre de Gilles par société a fortement augmenté et les cafés sont restés les mêmes. De plus, il faut bien dire que les Binchois ont du mal à contenir leur impatience et éprouvent le besoin de marteler le sol de leur ville. Ainsi, un jour, une société a ouvert la porte pour jouer à l'air libre. Et la tradition a évolué,…

Il est à noter que lors de ces répétitions, les futurs Gilles ne portent aucun élément de leur costume. A ce sujet, deux écoles "s'affrontent ". La première préconise le port des sabots et du ramon dès la répétition de batteries. La seconde prétend que vu l'optique primitive dans laquelle se déroulait la répétition il n'est pas logique de mettre ses sabots et de prendre son ramon. A vous de choisir!

Cette tradition est quelque peu différente de ce qui se faisait avant. En effet, auparavant, les batteries "tournaient", allaient de local en local et jouaient devant les membres des sociétés qui passaient alors contrat avec celle de leur choix. A l'heure actuelle, les contrats sont renouvelés d'année en année. Là aussi, la tradition a évolué.

En fait, il s'agit plutôt d'une petite soumonce en batterie. Quant à la réelle répétition de batterie, réelle dans son but premier d'écouter la batterie, elle se déroule quelques semaines avant le début des soumonces et est appelée " audition de batterie ". Un dimanche à l'heure de l'apéritif, la batterie invite les membres de sa société à venir l'écouter et à se retrouver une dernière fois avant les réjouissances des soumonces et du Carnaval.

Les Soumonces en batterie



Les deux semaines suivantes voient l'arrivée des soumonces en batterie. Celles-ci sont une étape supplémentaire dans l'escalade du cocon folklorique. Les sociétés de Gilles et de fantaisie partent vers 15 heures de leur local respectif et battent le sol de Binche au son des batteries montrant leur puissance et leur dextérité à jouer l'"avant-dinner".

Les sabots claquent, les apertintailles tintinnabulent, ajoutant aux battements des tambours une note musicale originale et les ramons se dressent vers le ciel. Mais toujours pas de costumes éblouissant aux lions couronnés que l'on ne verra que le Mardi-Gras.

La masse des gens derrière la société gonfle d'heure en heure. Et les sociétés voyagent ainsi dans la ville, de café en café, haltes bien méritées pour les tamboureurs… et les membres!

Les Soumonces en musique



Lors des deux dimanches de soumonce en musique, les sociétés partent vers 15 heures de cafés situés à l'extérieur du centre de la ville pour s'y rejoindre vers 20 heures.

Dernière étape dans la préparation de ce Carnaval, les soumonces en musique ont en plus de la batterie, la musique. Constituée d'instruments à vent tels que la clarinette et la trompette, la "musique" joue les airs de Gilles au nombre de vingt-six. Ils sont d'origines diverses et remontent au dix-neuvième siècle dans leur forme et leur arrangement mais les mélodies proviennent d'airs du dix-huitième siècle.

Les sociétaires ont troqués l'apertintaille et le ramon contre le travesti de l'année précédente. C'est d'ailleurs bien souvent l'occasion pour les Binchois de voir pour la première fois les costumes sortis le Dimanche-Gras de l'année précédente. Ce n'est pas une généralité, mais peut-être est-ce une "obligation" économique: rentabiliser le costume. Cependant, cette habitude, cet usage courant a tendance à disparaître.

Il peut être intéressant de savoir que durant ces sorties, tout comme au Carnaval, une société de Gilles fonctionne par cagnotte: plusieurs groupes de Gilles au sein d'une même société s'organise pour le choix et la confection d'un costume de travesti vêtu le Dimanche-Gras ainsi que pour les commandes de boissons aux arrêts dans les cafés. Un Gille responsable tient la cagnotte, la bourse et se charge d'aller au comptoir commander la tournée. Cette habitude s'est bien souvent étendue aux groupes extérieurs, ceux qui suivent.

Les Bals



La Nuit des Trouilles de Nouilles avait lieu, il y a quelques années, un bal dans la salle du théâtre communal aujourd'hui transformé: le traditionnel bal des Supporters organisés par l'association des supporters de l'équipe de football. C'est le dernier d'une série qui a commence trois semaines plus tôt.

Trois bals de gala sont organisés par les jeunesses réunis selon leur appartenance à l'une des grandes familles politiques de la ville; à savoir, par ordre chronologique, socialiste, libérale et catholique. Ils connaissent chaque année de plus en plus de succès. Le bal de la jeunesse catholique, par exemple, était considéré dans les années soixante comme étant le second bal costumé de Belgique, directement après le bal du Rat Mort d'Ostende.

Chaque année, un thème est choisi et les participants confectionnent, en groupe ou individuellement, un costume cadrant avec ce thème. Un orchestre mène la danse sur la scène, et l'on découvre les costumes aux coloris les plus fous par leur entrée remarquée dans la salle. Un concours récompense le plus beau travesti individuel, le couple qui a fait preuve de la plus belle idée de costume ainsi que le plus beau groupe. Ce bal se termine aux petites heures puisqu'il est fréquent que les derniers fêtards s'en retourne chez eux à l'heure où les plus sages se lèvent. Dans les années 30 à 50 encore, les derniers participants se rendaient à la première messe célébrée en la collégiale Saint-Ursmer.


Ces bals ont lieu dans des salles de la ville. Il y a quelques années, ils se déroulaient dans la salle du théâtre. Mais suite à des travaux de réaménagements, ils furent déplacés en d'autres endroits. Pour les bals socialiste et libéral, ils se déroulent dans la salle dite du Kursaal. Quand au bal catholique, il est retourné à ses origines en se réorganisant dans la salle nouvellement restaurée du Cercle Catholique.

La Nuit des Trouilles de Nouilles



Le lundi précédant les jours gras, les rues du centre de Binche sont envahies par des masques, des groupes de personnages étranges, méconnaissables sous leur costume, le visage caché tantôt par une face de grand-mère, tantôt par une tête de singe ou tout simplement par le drap blanc d'un fantôme. Des centaines de trouilles vont de café en café, de maison en maison, à l'assaut d'une victime.

Cette nuit est chaude en rires et moqueries. On l'appelle la nuit des Trouilles de Nouille. Dans notre patois local, une trouille est un personnage malpropre, une truie. Le mot nouille n'a aucune signification si ce n'est au point de vue de la sonorité de l'ensemble de l'expression. Peut-être faut-il y voir un rapprochement avec "guenouille" qui dérive de guenilles. En effet, les Trouilles reprennent un principe des carnavals où les gens s'habillaient de guenilles - carnavals "vulgaires" moins hiératiques que le Carnaval que l'on connaît actuellement à Binche.

Durant toute cette soirée, les masques prendront un malin plaisir à intriguer les imprudents qui auront préféré laisser leur visage à la vue de tous. Cela leur en coûtera quelques verres. Les trouilles montreront à leurs victimes qu'elles les connaissent en révélant des choses parfois intimes. Le timbre de la voix changé pour éviter d'être identifiés, ils ne se tairont qu'au prix d'un verre bu à la paille pour ne pas relever le masque.

Les Trouilles de Nouille, par leur mascarade, sont à rattacher à la noble tradition des carnavals européens dans lesquels le masque tient une place très importante. Il serait dommage que ce maillon de notre tradition se perde dans l'oubli.


Dimanche-Gras



Lorsqu'arrive le Dimanche-Gras, la longue période où le folklore prend le pas sur la vie professionnelle de chaque Binchois entre dans sa dernière phase. Le Carnaval proprement dit va rythmer le pouls de la cité aux remparts pour trois jours de fêtes intenses.

Le premier jour, dès les premières lueurs du soleil levant qui annonce de nombreuses heures de réjouissances, les premiers tambours se font entendre. Ainsi, aux alentours des neuf heures du matin, de petits groupes se forment, de maison en maison, au son du tambour qui joue l'"avant-dinner" ou de la viole (voir infra).

Ces groupes au sein desquels les futurs gilles se regroupent par affinité en une cagnotte déambuleront à travers la ville. Les gens peuvent ainsi profiter des heures matinales pour découvrir les travestis gardés secrets jusqu'à ce jour et préparés de longue date. Ces costumes sont des représentations de costumes les plus fous, des clowns, des travestis tous aussi originaux les uns que les autres.

A ce sujet, il faut parler d'un type de travestis spécifique du Dimanche-Gras. Il s'agit des mam'zelles. Ces derniers, même s'ils ne sont plus aussi nombreux qu'avant car bien souvent très onéreux, sont vraiment typiques dans la cité du gille. Il s'agit d'hommes se travestissant en femmes, aux couleurs vestimentaires les plus riches et aux tissus les plus raffinés, de styles Belle Époque ou Napoléon III. On les retrouvait auparavant non seulement au sein des sociétés mais également seuls ou en couple, au son de la viole ou de l'accordéon. Elles poursuivaient la tradition que l'on retrouve dans la plupart des carnavals d'Europe de l'homme déguisé en femme.

Vers dix heures, les sociétés sont au complet dans le centre de la ville. C'est là que l'on découvre dans une cohue indescriptible l'ensemble des travestis dans une cohabitation très serrée sur le pavé. La fraîcheur du matin a rendu exquise la brillance des costumes. Les vendeurs de mimosas sont sur le trottoir depuis de nombreuses heures et font affaires parmi la foule joyeuse.

Vers midi la dislocation, celle-ci permet aux tambours de reconduire les travestis chez eux pour un bon repas avant le long cortège de l'après-midi.

Celui-ci prend son départ aux environs de quinze heures dans le haut de la ville, quartier de la gare. Les sociétés se succèderont l'une l'autre vers le centre. Les batteries accompagnées des musiques joueront les airs de Gilles pour leur propre société. Le cortège permet aux étrangers de voir sans trop de difficulté l'entièreté des sociétés. Il prend fin vers 19 heures, à la tombée de la nuit.

Jusqu'onze heures du soir, les sociétés vont de café en café, avec un entrain incomparable. C'est à cette heure environ qu'elles effectuent chacune leur rondeau. Les membres forment un cercle autour de leurs musiciens pour les ultimes airs de gilles avant le départ des cuivres.

Le reste de la nuit se fera au son de l'"avant-dinner", les tamboureurs frappant de plus belle la peau du tambour. Les ra et les fla se succèdent à un rythme effréné, au plus grand plaisir des travestis qui retrouvent les tambours pour des roulements infernaux et ce jusque tard dans la nuit.

On termine celle-ci en " rengageant " c'est-à-dire que chaque "Gille" paie un supplément pour le salaire des tamboureurs. Cette pratique se rencontre également le Mardi-Gras dans la nuit.

Lundi-Gras



Le Lundi-Gras est "le jour de la jeunesse". Lorsque nous avons parlé des différents bals se déroulant les trois samedis précédents le Carnaval, nous vous avons présenté les différentes jeunesses binchoises.

Il en existe trois: la Royale Jeunesse Catholique, la Jeune Garde Libérale, la Jeune Garde Socialiste.

Cette journée du lundi est entièrement organisée et animée par ces trois jeunesses.

C'est vers 10h00 que tout commence. Après une courte nuit, les jeunes Binchois et Binchoises (surtout jeunes de caractère) vont danser au son de la "viole". Ces violes sont en fait des orgues de barbarie où les cartons troués sont remplacés par un cylindre clouté. Auparavant, elles étaient fabriquées hors de la Ville mais depuis quelques années, un artisan binchois, Jocelyn Lebon a décidé d'en construire quelques-unes.

Les bandes, bras-dessus, bras-dessous, glissent au son aigrelet de la viole portée et actionnée par "el maniqueu". Les fanfares locales (au nombre de trois également) suivent "leur" jeunesse. Aussitôt la viole arrêtée, elles se mettent à jouer des airs à la mode… et les couples dansent à même le pavé.

L'ambiance bat son plein en ville et dans les cafés où les "batailles de confetti" font bien des victimes… consentantes. Car quiconque ne sait pas s'amuser n'a pas sa place au Carnaval de Binche!

L'apéritif se prolonge et, vers 15 heures, les jeunesses se rassemblent dans leur local. Les enfants dansent au rythme des tambours et des cuivres. Ils offrent des oranges. Sur la Grand'Place, face à l'Hôtel de Ville, les trois jeunesses réunies constituent le "rondeau de l'amitié". Les petits jouent leur rôle avec autant de fierté que les grands.

Le rondeau terminé, il est près de 17 heures. Les jeunesses se reconstituent séparément et montent vers la gare où un feu d'artifice est tiré en leur honneur vers 19 heures.

Les jeunesses regagnent ensuite leur local, toujours en dansant, mais elles ne tarderont pas à rentrer car demain, c'est le grand jour. Beaucoup d'enfants feront le Gille, le Paysan, le Pierrot ou l'Arlequin: il faudra être en pleine forme.

Les adultes, futurs Gilles, devront également se résoudre à faire preuve de raison. Ce n'est qu'à contrecoeur qu'ils quitteront l'ambiance mais quelques heures de sommeil s'avèreront nécessaires pour assumer son rôle de "Roi" du lendemain.

Mardi-Gras



Avant toutes choses, il faut bien noter que le Mardi-Gras est le seul jour où l'on peut voir les Gilles, les Paysans, les Pierrots, les Arlequins et, auparavant, les Princes d'Orient et les Marins, en costume traditionnel.

Le plus long jour de l'année, le plus beau aussi. Le coeur des Binchois bat d'un autre rythme en ce jour. Il vit au rythme des tambours, de la musique et du pas cadencé. Très tôt le matin, les maisons s'allument et l'effervescence commence. Les esprits sont entièrement au service du Carnaval. Dès trois heures du matin, les bourreurs font leurs tournées, de maison en maison, de Gille en Gille, pour contribuer à la naissance du roi du jour. Tout un petit monde s'affaire autour du personnage. L'épouse, l'amie ou la mère prépare l'habillage, met le mouchoir de cou (ou foulard de cou) qui protégera le Gille des coupures de la collerette, aide son époux à enfiler la blouse, s'inquiète du bien du Gille. L'attente du bourreur est parfois stressante. "Dans une demi-heure, on vient déjà me chercher et le bourreur n'est toujours pas là". Les invités qui auront le privilège d'assister à l'habillage de leur hôte sont déjà là, impatients de vivre le Carnaval avec des Binchois, directement dans le feu de l'action.

Lorsque le bourreur arrive, la "cérémonie" peut enfin commencer. Par des gestes traditionnels, il prend la paille, la froisse pour en faire des torquettes. Celles-ci, placées minutieusement sous la blouse formeront la structure des deux bosses. La sensation ressentie par le Gille lorsque la première torquette est mise en place est inexprimable. C'est à ce moment que l'on se rend compte que c'est le plus beau jour de l'année. Les plus sentimentaux verseront peut-être une larme de joie. Une telle expression de bonheur n'est sans doute pas compréhensible pour des gens ignorant tout ces rites ancestraux. Mais la dernière des choses à faire est de s'en moquer. Servir une tradition est pour le Gille beau et noble.

Le bourrage terminé, l'épouse achève les préparatifs. Elle applique avec soin la collerette sur les épaules, attache avec douceur le noeud à la collerette, met la barrette, ce bonnet blanc, sur la tête qu'elle entourera du mouchoir de cou plié précautionneusement et noué dans les règles de l'art. Les hanches du Gille sont ceintes de l'apertintaille aux sonnailles mystérieuses. Cela se termine par la mise en place du grelot sur le plastron de la blouse.

Lorsque par après, d'autres Gilles viennent chercher leur partenaire dans la profondeur de la nuit, celui-ci offrira le verre de champagne, le premier de sa journée (tradition bourgeoise provenant du siècle passé). Embrassades et sourires sont la preuve, à ce moment, que le Carnaval fait gonfler le coeur de chacun. Ce sera aussi l'occasion de danser au son des tambours et d'un pipeau ou d'une flûte l'Aubade matinale. Cet air ne se joue que le Mardi-Gras au matin.

Puis, le ramassage reprend et l'on se rend dans une autre maison, celle d'un autre membre de la société. Le groupe augmente et le nombre de personnes suivant les Gilles gonfle avec lui.

Ces premières heures du Mardi sont, de l'avis de tous, les plus belles, celles à ne pas manquer pour ne pas rater le sens d'un folklore cher aux Binchois. Les couleurs blanches des barrettes et des collerettes dans le noir de la nuit sont un spectacle de contrastes merveilleux. Le tout rythmé par le claquement des sabots et le tintement des apertintailles qu'accompagnent un seul tambour et caisse. Les ramons, parfois, s'envolent vers une connaissance pour le saluer et lui souhaiter bon Carnaval.

Vers huit heures, les groupes se rassemblent dans le haut de la ville pour former la société au complet. Certains vont déguster, en guise de petit déjeuner, une assiette d'huîtres dans un restaurant du quartier de la gare. Mais il ne faut pas croire qu'il s'agit là d'une généralité.

A partir de là s'entame la "descente" vers le centre de la ville pour se rendre à l'hôtel de ville où les sociétés sont reçues par le bourgmestre. Vers dix heures, en arrivant dans ce qu'on appelle le bas de la ville, les Gilles mettent leur masque. C'est ainsi qu'ils ont l'air mystérieux, tous issus de la même origine, martelant le sol du même pas cadencé. Aux arrêts, les épouses ou les mères, tiennent dans leurs mains, avec précaution, les masques, dans un mouchoir blanc afin de le protéger et d'en essuyer la sueur.

Lorsque la société arrive devant l'hôtel de ville, sur la Grand'place, elle fait un rondeau avant d'entrer dans celui-ci, en attendant que la Salle de Mariage se vide de la société présente. Dès qu'elle entre dans l'hôtel de ville, les sabots claquent de plus belles sur le carrelage de la salle. Après avoir ôté leur masque, les Gilles écoutent attentivement le bourgmestre pour la célébration des jubilaires. Chez les Paysans, on fête les jeunes ayant fait le Paysan durant douze années. Pour les Pierrots, cela se limite à six ans car ce ne sont que des enfants de primaires qui sont membres de cette société. Pour les Gilles et les tamboureurs, on trouve des jubilaires de vingt-cinq, quarante, cinquante et soixante ans. Cette réception se fait en présence des invités des édiles communales. Après que le bourgmestre ait lancé son traditionnel "Tambours !", ceux-ci se mettent en branle et la société sort pour laisser la place à la suivante.

C'est ensuite qu'à lieu la dislocation. Chacun rentre chez lui, accompagné d'un tambour car le Gille ne se déplace jamais sans tambour. Par petit groupe, la société se disperse pour se reformer, après le repas, vers quinze heures, pour le départ du cortège.

C'est pendant ce cortège que l'on peut découvrir les Gilles avec leur coiffe majestueuse, ce chapeau aux plumes d'autruches qui semble flotter au-dessus du chef de son propriétaire. Les plumes gonflées par le frisage donnent une impression de majesté aux Gilles. C'est aussi à cette occasion que ceux-ci ont troqué le ramon pour le panier en osier. Celui-ci rempli d'oranges se videra à force que la pluie d'orange avance. Le Gille puise dans son panier pour offrir l'orange aux visiteurs amassés tout au long de la grand'rue. Les mains se tendent pour attraper cette offrande. Les appels se font pressants pour en obtenir de la main même d'un Gille. Celui-ci, alors, tend son panier vers le quémandeur. Il en fait de même pour les connaissances qu'il rencontre tout au long du trajet. Cette offrande explique le fait qu'il est interdit de relancer les oranges aux Gilles. Cela serait pris comme le refus d'un cadeau. Les oranges de réserve sont portées par des porteurs attitrés, dans des sacs et non pas dans des charrettes ou dans des camions comme on en voit dans d'autres carnavals. Auparavant, les Gilles, en lieu et place des oranges, distribuaient des noix, des oignons, des pommes, …

Les sociétés évoluent ainsi, l'une à la suite de l'autre, au son de la musique, en direction de la Grand'place. Là, les musiques et les tamboureurs de toutes les sociétés uniront leurs efforts afin de jouer pour tous les Gilles dansant en un rondeau mémorable, spectacle inoubliable autour de la Grand'place.

Après quelques tours, les musiques s'arrêtent et des tambours se mettent en route pour conduire les Gilles vers leurs locaux ou d'autres endroits pour y prendre un bref repos, changer de barrette et de mouchoir de cou pour toujours faire preuve de fraîcheur.

Ils se mettent ensuite en route vers le point de départ du cortège du soir, le cortège aux lumières. Il suit le même trajet que celui de l'après-midi mais les Gilles n'ont plus de chapeau et dansent avec leur panier retourné, dressé vers le ciel. Tout au long de ce pèlerinage, les feux de Bengale projettent les ombres énormes des officiants de ce rituel sur les murs des maisons, des fontaines de lumières s'embrasent à l'approche des sociétés.

Lorsqu'ils arrivent sur la Grand'place, ils se tiennent l'un l'autre par le panier dressé et tournent ainsi en un rondeau qui ne s'arrêtera que lorsque le feu d'artifice se terminera. Celui-ci est bien souvent très beau. Des plafonniers surmontent la Grand'place et crachent leur lumière vive sur celle-ci. Les fusées montent vers le ciel pour épanouir leurs corolles multicolores. Le bouquet final est le signal déclenchant le regard des gens vers le panneau "Plus Oultre" qui s'illuminera dans un esprit de fête. Plus Oultre, la devise de la ville de Binche. C'est toujours un moment pathétique.

Comme l'après-midi, les sociétés vont prendre un peu de repos avant de se remettre en route.

Vers vingt-trois heures, les derniers rondeaux du Carnaval, en musique, tout comme le Dimanche-Gras à pareille heure. Après celui-ci, aura lieu la dislocation des musiques et les cuivres arrêteront. Seules les batteries se feront entendre à travers toute la ville et même au-delà.

Le Carnaval se termine bien souvent vers cinq ou six heures du matin, le Mercredi des Cendres. Encore une fois, le Gille est raccompagné chez lui par un tambour puisqu'il doit être rentré avant que le jour ne se lève.

Le Carnaval d'une année est fini, sans doute, mais déjà, celui de l'année suivante est en train de naître. Il ne quitte jamais entièrement l'esprit des Binchois.

source:http://www.carnavaldebinche.be/

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